Close

TALC

Rendez-vous avec la créatrice Thérèse Yang et sa marque de prêt à porter pour Enfant TALC _ février 2013

Cassandre Montoriol - Talc 1

Quand as-tu créé Talc ?

Nous avons créé Talc avec mon associée Catherine Chabas à l’été 2007.Lorsque ma fille est née en 2002, toutes les lignes pour enfants que l'on connaît aujourd'hui n'existaient pas encore. On trouvait des marques comme Bonpoint ou Sergent Major mais pas grand-chose entre les deux. Puis, avec le baby-boom de cette époque, une nouvelle génération de créateurs est arrivée, une marque comme Bonton a pris de l'ampleur et bien d'autres sont nées.

Je me souviens d'une démarche comme celle de Jean Touitou pour APC : une mode disons… plus anonyme, pas grand luxe, plus abordable mais réfléchie, parisienne.Je pense que c'est une génération de créateurs inspirée par ce mouvement qui a installé une nouvelle écriture dans la mode enfant à ce moment-là.

Cassandre Montoriol - Talc 2

Pourquoi ce nom Talc?

Au départ, je voulais un nom de créateur. J'avais pensé à "Coco Martin", comme un hommage à deux créateurs que j'adore, Coco Chanel et Martin Margiela, mais ce nom existait réellement. On a ensuite cherché des anagrammes, qui ne fonctionnaient pas non plus puis, finalement, Cléo Charuet - qui s'occupe de l'identité visuelle de la marque - a trouvé l’idée, imaginant avec le nom Talc : Thérèse Aime Le Chic, Thérèse Aime Le Chocolat, etc. Un peu sur le ton de la plaisanterie mais j'ai aimé cette idée du blanc, du poudré, du soin, et cette odeur de l'enfance. Je l'utilisais moi-même beaucoup pour ma fille lorsqu'elle était petite. Finalement ça a plu à tout le monde, Talc s'est imposé.

Qu'y avait-il avant Talc?

Je dirais qu'il y avait surtout le dessin. En Corée lorsque j'étais enfant, je vouais un amour inconditionnel aux paper dolls, ces planches de mangas avec des personnages que l'on habille de vêtements à petites languettes. J'en avais des valises entières. Arrivée en France, à l'âge de 7 ans, je n'en ai plus trouvé et j'ai donc commencé à en dessiner, avec les tenues et accessoires. Pendant toute ma scolarité, j’ai su que je voulais dessiner des vêtements. Puis, après deux années passées au Studio Berçot, j'ai changé d'envies - j'ai compris très rapidement que je ne serais pas Coco Chanel - et me suis finalement dirigée vers l'image et la direction artistique.

J'ai assisté Marc Ascoli sur des campagnes de pub pour Chloé, Calvin Klein, Hugo Boss et d'autres et, parallèlement à cela, j'ai été professeur de style et de dessin de mode pendant 9 ans à Berçot. Peu avant la naissance de ma fille, j'ai également été acheteuse pour un grand magasin coréen où l'on achetait du Balenciaga, du Lanvin, etc. Après pas mal d'expériences différentes dans ce milieu, j’ai eu envie faire quelque chose de plus personnel. Je me suis naturellement dirigée vers la mode pour enfants avec l'idée de créer des vêtements de qualité et accessibles. C'était notre objectif et malgré les difficultés économiques, j'arrive à maintenir ce rapport.

Cassandre Montoriol - Talc 3

Tu as tout de suite produit tes vêtements en Corée ?

On espérait vraiment une production française au départ mais on a vite réalisé que ce n'était malheureusement pas possible. On a essayé de travailler au Portugal mais la production n'était pas au point et pour le jersey, les quantités demandées étaient trop importantes. Puis, un été où je passais des vacances en famille à Séoul, j'ai fait faire une série de tee-shirts dans un jersey imprimé et ça a commencé comme ça, alors que ce n'était pas du tout mon intention au départ. Rapidement, j'ai vu que la production était tout à fait correcte, un rapport qualité prix raisonnable et aujourd'hui presque la totalité des vêtements est fabriquée en Corée.

Quel est le rythme de ces voyages en Corée?

J'y vais six fois par an. Je vais partir bientôt pour lancer la production de l'hiver prochain, je rentrerai avec une sélection de tissus puis j'y retourne fin avril pour lancer la collection de l'été 2014. Je dois y aller à nouveau pour vérifier la marchandise une fois prête, gage de tranquillité pour la suite... Je fais aussi réaliser mes accessoires là-bas.

Il a fallu mettre tout ça en place mais aujourd'hui ça fonctionne bien. La première fois que je me suis aventurée sur un marché de tissus j'ai été très impressionnée et j'en suis sortie épuisée. C'est un marché Saint-Pierre multiplié par mille ! Maintenant je m'y retrouve, et puis je suis coréenne, je parle la langue.

Cassandre Montoriol - Talc 4

Cette jolie collection d'accessoires, qui accompagne chaque saison, fait partie de l'image de Talc…

C'est un peu la cerise sur le gâteau et je dois dire que cela plaît beaucoup ! Je passe du temps sur l'histoire et la conception d'une collection et les accessoires en découlent assez facilement. Ils y prennent place, comme sur la collection de cet été, avec les déclinaisons autour des fleurs et des papillons.

Comment se déroulent tes journées de travail chez Talc?

La boutique est importante. J'ai la chance d'être bien située dans un espace très agréable. Je passe chaque matin pour travailler avec mes assistantes, m'occuper du suivi de production, voir les achats, ce qui fonctionne, ce que les gens aiment. J'y déjeune souvent aussi mais je travaille le style et le dessin chez moi.

Qu'est-ce qui t'inspire dans ton travail ?

Les images. Ça peut être une ancienne photo de plage avec ma fille, un fleuriste, la couverture d'un magazine, etc. J'ai une mémoire visuelle. Et puis j'ai eu la chance d'étudier la mode au début des années 90, quand il y avait des personnalités incroyables comme John Galliano, Martin Margiela, Rei Kawakubo... La mode aujourd'hui s'inspire toujours de ces gens-là. Étudiante, j'étais habilleuse pour les premiers défilés de Galliano, je me souviens de cette créativité délirante et merveilleuse. Il y avait un côté "fabriqué à la maison" - au bon sens du terme - et de vrais créateurs avec chacun leur univers. Ces personnalités et la richesse de ces années continuent de m'influencer.

Peux-tu me donner une qualité importante pour toi dans ce travail ?

La rigueur. Je sais qu'il en faut beaucoup pour durer dans ce métier.

Cassandre Montoriol - Talc 6

J'aime beaucoup Les campagnes TALC, avec qui travailles-tu ?

Je suis entourée d'une équipe fidèle qui soutient TALC depuis le début : Cléo Charuet qui s'occupe de la direction artistique avec moi et de l'identité visuelle ; les photographes Sofia Sanchez et Mauro Mongiello ; Daniel Fumaz, modéliste génial qui très amicalement m'aide beaucoup ; puis Camille et Barbara qui sont à la boutique. C'est une petite équipe et ça fonctionne très bien.

Un produit phare?

Le Sweat-shirt à oreilles. Très gros succès. Je l'avais dessiné pour égayer un peu ma première collection qui était assez "austère". Sur le premier salon, on me l’a commandé, nous l’avons produit et depuis, c'est un "classique" que je  réinterprète chaque saison. Ce sweat-shirt est devenu l'image de la marque, malgré nous...

 

Cassandre Montoriol - Talc 7

De la même manière sur les premières campagnes, les enfants étaient masqués !

À vrai dire, ma fille et celle de Catherine, avec quelques amis à elles, posaient sans aucune conviction pour cette première collection et faisaient même franchement la tête ! Et puis il y avait aussi un côté un peu impudique à montrer nos enfants. On a donc eu l'idée de les camoufler derrière des nuages de talc, ensuite avec des masques d'animaux… Puis ça a évolué, tout comme les collections.

Quelle est ta clientèle ?

J'aimerais qu'elle soit plus grand public mais j'ai l'impression de toucher une clientèle plutôt citadine, qui aime la mode. On a aussi pas mal de touristes à la boutique, c’est dû à son emplacement rue Jacob, tout près de Saint-Germain-des-Prés et, par le biais de mes revendeurs, je peux dire qu'un marché comme l'Asie fait aussi partie de ma clientèle.

Où aimerais-tu ouvrir une autre boutique?

Spontanément je dirais Tokyo qui est une ville fascinante. J'aime la mode japonaise et les Japonais adorent TALC. J'aimerais aussi avoir une boutique rive droite même si ce n'est pas encore à l'ordre du jour. Pour l’instant, je viens de conclure un accord avec un distributeur Japonais que j'apprécie, il a déjà été acheteur en gros de TALC et va désormais distribuer la marque là-bas. Le début d’une nouvelle aventure.